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5è jour à l'Etrange festival

Mercredi 13 septembre 2023

 

Retour sur un mercredi fort de trois longs-métrages, avec le thriller parano Tormented de Bert I. Gordon (1960), le huis-clos horrifique australien You'll Never Find Me (2023) de Josiah Allen et Indianna Bell, et pour finir par l’iconoclaste autrichienne Jessica Hausner avec Club Zero (2023).

 

 

TORMENTED - USA – 1960 – Bert I. Gordon

Hommage à Bert I. Gordon

 

Pitch : Alors qu’il s’apprête à se marier, un pianiste de jazz vivant sur une île est tourmenté par le fantôme de son ancienne maîtresse qu’il a laissé tomber du haut du phare.

 

On continue l’exploration de la filmographie atypique de Bert I. Gordon, disparu à l’âge plus que vénérable de 100 ans en mars 2023 et dont son dernier film Secrets of a Psychopath fut tourné en 2015 à l’âge de 93 ans… Avec Tormented, Gordon s’empare du thriller familial proche dans l’esprit des œuvres d’Alfred Hitchcock avec trahison, mensonge et mort violente. Tout un arsenal dont est victime (et à l’origine) Tom Stewart (Richard Carlson, L'Incroyable Monsieur X) devant se marier avec Meg (Lugene Sanders), et ayant décidé d’éconduire sa maîtresse Vi Mason (Juli Reding avec son faux air de Marylin Monroe). Évidemment, Vi ne veut pas céder et menace de tout révéler à sa rivale.

Le drame se joue en haut d’un phare où la dispute entre les deux amants se termine tragiquement avec la chute de Vi dans le vide à cause d’une rambarde défectueuse, et l’opportunité de profiter de l’occasion pour ne pas rattraper la malheureuse et la laisser se noyer dans les flots. Sur ce canevas assez classique, Gordon construit un film de vengeance par-delà la mort puisque le fantôme de Vi a la bonne idée de venir tourmenter son ancien amoureux. Le récit fait planer le doute un temps sur la véracité des événements en lien avec la culpabilité de Tom, ce dernier a des hallucinations. Le fantastique s’insinue par petites bribes, des pas dans le sable, des murmures ou des algues ressemblant trop à un corps.

Et le réalisateur de s’amuser à terroriser son héros en faisant apparait le spectre de sa belle amante ou à utiliser des effets spéciaux dont il a le secret pour un dialogue avec la tête coupée de Vi. Sans doute les meilleurs moments du film avec en particulier dans la dernière bobine la cérémonie du mariage où toutes les fleurs fanent instantanément au passage du fantôme de Vi apportant un aspect réellement surnaturel au film. Pour le reste, et malgré une durée courte (1h15), Tourmenté en vf reste limité à quelques personnages comme la fille de Tom (Susan Gordon la propre fille du réalisateur) et Nick en maître-chanteur, la faute à un script de court-métrage ou à digne d’un épisode de la Quatrième Dimension, même si on n’appréciera l’utilisation du phare comme un personnage à part entière que n’aurait pas renié un Hitchcock dans ce sous-genre du thriller de vengeance.

 

3/6

 

 

You'll Never Find Me – Australie – 2023 – Josiah Allen & Indianna Bell

En compétition

 

Pitch : En pleine nuit, alors que la tempête fait rage, une jeune femme dans le besoin vient frapper à la porte du mobile home de Patrick, méfiant et solitaire. Il la laisse entrer. Intrigués et soupçonneux, tandis qu’ils apprennent à se connaître, ils se sentent menacés. Mais que doivent-ils vraiment craindre ?

 

L’art du huis-clos est un exercice périlleux souvent réservé aux jeunes réalisateurs avec des ambitions à la hauteur d’un budget forcément réduit à l’instar de ce premier long-métrage de Josiah Allen et Indianna Bell tout droit venus d’Australie. Une terre fertile pour le cinéma fantastique depuis le siècle précédent et refaisant parler de lui récemment avec le succès de La Main (aka Talk To Me). You'll Never Find Me émargerait-il dans la même catégorie ? Que nenni mes amis, le film tourne rapidement sur lui-même engoncé dans ce mobil home et un scénario très bavard masquant une absence d’enjeux criants.

Et pourtant l’entame laissait présager une ambiance bien poisseuse et glauque lorsqu’une jeune femme (Jordan Cowan, Wolf Creek 2) débarque sous une tempête de tous les diables trempée et les pieds nus boueux dans la caravane d’un certain Patrick (Brendan Rock, The Stranger) un homme visiblement taciturne assis devant une bouteille d’alcool à deux heures du matin. Situé dans un camping au milieu de nulle part, le décor est planté avec cette frêle jeune femme face à une espèce d’ours barbu mal léché pas avenant pour un sou. Elle souhaite appeler un taxi afin de regagner son hôtel. Patrick la convainc de rester et de se réchauffer avant de l’aider à repartir.

Dans sa première partie, le film se résume à un affrontement verbal entre les deux protagonistes. Une fille forcément méfiante arrivée en pleine nuit chez un inconnu (même si elle prend progressivement ses aises) et un homme qui se détend lentement devenant plus aimable comme un gros nounours. Beaucoup de bruit pour rien en fait, la bande ne décolle jamais et s’enferre dans cette idée de deviner si Patrick n’est pas la personne qu’il décrit. On a même l’impression à un moment que la jeune femme (on ne connaît pas son nom) n’est pas là par hasard. Il faudra attendre la dernière bobine pour enfin découvrir le pot aux roses, un basculement qu’on avait déjà bien vu venir dès le départ et sans réel intérêt pour le spectateur, attendant autre chose qu’un dénouement d’une telle fadeur même si la violence visuelle et les traumas de Patrick ressurgissent au son de cet orage récurrent.

Dommage, mais les deux réalisateurs ne franchissent jamais le cut de leur histoire trop prévisible, et balayant avec application tous les clichés du cinéma horrifique pour un résultat laissant votre serviteur pantois et sans explication entre fantasme et obsession. Mon voisin Julien, avec qui je partageais la séance, me signala qu’il trouvait que le générique final défilant sur l’écran sans musique et seulement accompagné du chant des cigales, donnant un aspect apaisant et bucolique, était finalement le meilleur moment du film. C'est dire...

 

2,5/6

 

 

CLUB ZERO – Autriche/UK/All/France/Danemark – 2023 – Jessica Hausner

En présence de la réalisatrice

 

Pitch : Dans un lycée privé, la bienveillante Miss Novak initie d’innovants cours de nutrition qui bousculent les habitudes alimentaires. Parents, professeurs et adolescents sont ravis. Subjugués, certains élèves vont intégrer le mystérieux Club Zéro.

 

Jessica Hausner (Little Joe, déjà présenté à l’Etrange Festival) revient hanter les couloirs du Forum des Images avec son nouveau projet (en compétition à Cannes cette année) toujours aussi tordu dans la manière de présenter le monde et de grossir ses travers, en l’occurrence les méfaits d’une professeure Miss Novak (Mia Wasikowska, Stoker) sur la santé mentale et physique de ses élèves. Elle choisit le biais des perturbations alimentaires chez les ados pour évoquer les ravages d’une thérapeutique alternative prônant l’alimentation consciente, soit une réduction drastique de l’ingurgitation de nourriture, aussi bien pour de la protection de la planète que pour la santé du corps humain.

Le monde dépeint est celui ultra policé d’une école pour riches avec son code vestimentaire un peu vieillot et peu d’élèves par classe. On y apprend la danse ou la musique, et l’arrivée de Miss Novak va remettre en cause l’éducation parentale notamment sur les pratiques alimentaires. Si en filigrane le scénario se moque de ces ultras riches perdus dans leurs certitudes et leur comportement, il explore les affres de la boulimie et de toutes ces maladies propres au mal-être humain et en particulier infantile. Sous le prétexte de bienfait pour le corps (l’ingestion d’une tisane personnelle fabriquée par Miss Novak avec son visage sur la bouteille), le film développe la manipulation mentale exercée (par les réseaux sociaux dans la vraie vie) par une femme sur des jeunes en leur prodiguant des conseils jusqu’à carrément arrêter de manger.

Comme souvent chez la cinéaste, elle va très loin dans son concept de société très froide et dépourvue d’émotions (elle se rapproche dans ce sens du travail d’Aki Kaurismaki) presque robotisée avec une dose d’humour de situation décalée et de dialogues trahissant la mésentente entre les personnages, où une simple idée bouleverse le quotidien de lycéens en quête d’identité. On pourrait également penser à La Vague de l’allemand Dennis Gansel sur le basculement idéologique. Dans cet univers rigoriste, se créée alors une sorte de dimension parallèle virant au fanatisme religieux et à la dérive sectaire sous les auspices bienveillants mais autoritaires d’une parfaite Mia Wasikowska. Il faudra certes accepter une forme de langueur, inhérente au cinéma de Jessica Hausner et à cette plongée dans l’abime et l’insertion insidieuse et progressive du mal avec quelques séquences peu ragoutantes jusqu’à un final plus poétique.

 

4/6

 

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