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4e jour à l'Etrange festival

Jeudi 9 septembre 2022

 

Pluie menaçante et décès royal pour entamer le week-end avec le polar SF Spiritwalker du coréen Kang Yi An, et de finir sur la Palme d’or du dernier festival de Cannes, Sans Filtre du suédois Ruben Östlund.

 

God save the screen !

 

 

SPIRITWALKER - Corée-du-Sud - 2021 - Kang Yi An

En compétition

 

Pitch : Condamné à changer de corps toutes les douze heures, Kang I-an recherche les traces de son moi originel, alors que tout le monde tente de le tuer… quelle que soit son enveloppe corporelle.

 

Ces dernières années, les productions coréennes semblent sortir d’un puits sans fond avec le risque, forcément, de puiser une eau trouble au fil de scénarios sans cesse ressassés. C’est un peu le cas de Spiritwalker qui émarge dans la catégorie « polar » mâtiné de fantastique avec ce personnage perdu dans ses souvenirs et son passé. Une sorte de Jason Bourne à la sauce asiatique, pourquoi pas. Sauf que le mélange n’est pas très limpide et tourne de l’œil avant la fin de la projection.

Pourtant, les premières laissent augurer d’un actionner comme les coréens savent les orchestrer avec cet homme Kang Yi An (Yoon Kye Sang, Crime Puzzle) réveillé au milieu d’un accident de voiture sans aucun souvenir. Aidé par un SDF facétieux, et véritable sidekick comique du duo de circonstance, notre héros n’aura de cesse de remonter la pelote de laine afin de retrouver son identité. Cerise sur le gâteau, il change de corps et de lieux toutes les 12 heures par le truchement d’une drogue ou… en fait on ne sait pas vraiment l’origine de ses malheurs et l’aspect surnaturel ne sera jamais explicité.

Si l’ensemble reste correctement shooté, il ne dégage aucun fumet particulier avec ces sempiternels gunfights et des courses-poursuites au milieu de gangsters forcément violents et adeptes de la gâchette et de la baston. Pire, le script désormais dans des eaux saumâtres de complexité multiplie les personnages laissant le spectateur dans un marigot de perplexité. Qui est qui ? se demandent en permanence les personnages à l’instar de votre serviteur perdu également dans une boucle temporelle et une tête lourde au point de fermer involontairement les yeux un petit laps de temps. Pas grave, les situations s’enchaînent avec comme une horloge bien huilée au gré des changements de décors (pour le coup les effets sont réussis) et du faciès de notre héros. L’enquête mène à une mystérieuse femme et le visionnage de caméras de surveillance placées sur les véhicules.

Dans la dernière partie, le scénario donne la clé de la compréhension en révélant la scène à l’origine des tourments de Kang Yi An et l’existence d’une drogue donnant des hallucinations et se déclenchant toutes les 12 heures mais n’explique pas véritablement ce passe-passe d’un corps à un autre. Bref, l’ensemble du casting semble avoir tout compris et le générique de fin peut débuter. Heureusement pour moi (ou l’inverse), je me réveille dans le même corps et me glisse dans la file de la prochaine projection.

 

3/6

 

 

SANS FILTRE – Suède/France/UK/All/Turquie/Grèce – 2022 – Ruben Östlund

En Mondovision et en présence du réalisateur

 

Pitch : Un couple d'influenceurs est invité pour une croisière sur un yacht clinquant, en compagnie de vieux nouveaux riches servis par un équipage soumis à leurs quatre volontés. Soudain, une tempête aux proportions épiques vient renverser l'ordre établi.

 

Comme indiqué en présentation par le réalisateur en personne, Sans Filtre viendrait clore un triptyque composé de Snow Therapy et The Square dans lequel le réalisateur explore les travers de l’âme humaine et d’une société en déliquescence. Il a visiblement tapé juste puisque c’est sa deuxième Palme d’Or après The Square, satire sur le milieu de l’art contemporain. Si Östlund ausculte notre monde avec des yeux rieurs, il en extrait la substantifique moelle avec un cynisme à la hauteur de ses personnages dans l’outrance de leur condition et avec cette sensation de vivre dans une bulle hors de leur propre univers.

Le film est composé de trois actes dont le premier introduit les personnages de Yaya (Charlbi Dean Kriek, décédée récemment dont le réalisateur a rendu un hommage avant le début de la séance) et Carl (Harris Dickinson, The King's Man : Première Mission) mannequins-influenceurs évoluant dans un monde de paillettes artificielles, se disputant sur qui doit payer la note du restaurant, se retrouvent sur un yacht ultra-luxe pour en faire la promo. Sur place, ils côtoient toute une ribambelle de millionnaires pour le début d’un voyage en enfer. La deuxième partie sur le bateau est le cœur du récit et sans doute recèle ses meilleurs moments entre gêne involontaire et ridicule provoqué par des personnages, certes caricaturaux, mais représentatifs d’une société à deux vitesses. Du vendeur d’armes au magnat russe fier de faire commerce de merde, « I sell shit ! » répète-t ’il en boucle, la petite communauté s’octroie toutes les faveurs et l’équipage accède à tous leurs désirs.

Les morceaux de bravoure du film (et les rires) se manifestent lors du dîner du commandant un soir de tempête où les invités s’empiffrent de nourriture au point de vomir et déféquer sur l’ensemble du bateau. A ce moment-là, les barrières sociales se brisent au gré du tangage et de séquences où les personnages sont pris de malaise. Et le réalisateur ne nous épargne rien du résultat des toilettes débordant d’excréments à la richissime clientèle se vomissant les uns sur les autres. Une situation burlesque, sorte de mixture entre La Grande Bouffe de Marco Ferreri et les Monty-Python du Sens de la Vie. Une ambiance d’autant plus surréaliste qu’elle se fait au son d’une discussion enivrée et mémorable entre le Commandant (excellent Woody Harrelson) et le russe Dimitri (Zlatko Buric) sur la politique, le Communisme et le Marxisme. Rien que ça, et sans aucun doute, les meilleurs moments du film.

On sera moins fan du dernier segment situé sur une île déserte après un naufrage où les survivants reconstituent un semblant de société en retournant les conditions de la vie en communauté. Ramené à cet instant à des relations primaires, Östlund appuie peut-être trop sur le rapport homme/femme. Certes, Triangle of Sadness en vo montre une masculinité très toxique mais l’ensemble des protagonistes n’est pas épargné même si sa charge morale contre le système capitaliste en général et les méfaits des réseaux sociaux ne sont jamais très subtiles. Une ultime bobine un peu longue mais on se souviendra longtemps de ce déferlement de merde liquide de vomi balancés à la face des personnages.

 

4,5/6