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2ème jour à l'Etrange festival

Mercredi 7 septembre 2002

 

2e journée à l’Etrange festival avec un regard dans le rétroviseur avec Itim, Les Rites de Mai de 1976 pour la rétrospective consacrée au philippin Mike de Leon et Under the Blossoming Cherry Trees daté de 1975 pour l’hommage au japonais Masahiro Shinoda. Entre problème technique de sous-titrage et interruption de quelques minutes dues à une électricité récalcitrante, on se serait presque cru à la Cinémathèque un vendredi soir avec projections d’incunables.

 

 

ITIM, LES RITES DE MAI – – Philippines – 1976 - Mike De Leon

Rétrospective Mike de Leon

 

Pitch : De retour en province dans la maison de son père, le jeune photographe Jun rencontre Teresa, une jeune femme hantée par la disparition de sa sœur et ses mystères. À mesure que Teresa se conduit de plus en plus étrangement, leur relation les conduit sur les traces d’un douloureux passé…

 

 

Du cinéma philippin, on connait surtout les séries B d’action des sieurs Eddie Romero ou Cirio H. Santiago. Il ne faudrait pas oublier Mike de Leon (Batch 81, Kisapmata) mis en lumière pendant l’Etrange festival, au cinéma plus posé et au fantastique bien plus atmosphérique que ses compatriotes. Son premier long-métrage, Itim, Les Rites de Mai en est le parfait exemple. La caméra suit les errances de Jun (Tommy Abuel) accompagné de son appareil-photo pour saisir les moments de vie de son village de province. Il est de retour chez lui, dans l’habitation familiale où son père survie mutique et alité certainement après une attaque cérébrale.

Il faudra donc accepter de se laisser porter par une caméra langoureuse au son de chansons traditionnelles mortuaires sise dans une nature omniprésente et luxuriante. On sentirait presque la moiteur de la jungle au milieu des apparitions furtives de Teresa (Charo Santos-Concio) dont la ressemblance avec sa sœur décédée augure d’un mélange des genres entre le récit de fantômes et les visions sanglantes de Jun. Mike de Leon nourrit également son film de l’environnement religieux et des rites du mois de mai afin de rendre hommage à Dieu. De longs passages où on voit la population se rassembler dans les églises, se prosterner ou bien encore des flagellations par des hommes cagoulés et à moitié nu sur un supplicié transformé en reproduction de Jésus sur sa croix simulant la crucifixion.

L’atmosphère s’avère donc lourde (itim signifie noir en philippin), y compris pour le spectateur qui doit être dans une forme physique adéquate pour suivre ce long-métrage très contemplatif, avant de se terminer par une séquence de spiritisme dévoilant les origines de cette sensation étrange d’une présence invisible dans la maison du père de Jun, qui cache un secret sans doute inavouable, assortie d’échos d’un passé tragique. D’ailleurs, les meilleurs moments du film se situent dans la demeure où Jun a le sentiment de ne pas être seul. A ce moment-là, Les Rites de Mai se pare des oripeaux des productions gothiques, le réalisateur jouant avec les pièces, les escaliers et l’obscurité. Si l’ensemble reste évanescent (et parfois suspendu par des longueurs, il fait quand même 1h56), il fraye également avec l’horreur et même la perversité lors des cauchemars de Jun.

Une ultime séance de spiritisme vient donner la clé de l’énigme au spectateur et aux protagonistes et clos un film au rythme langoureux et pas toujours facile à suivre. Itim, Les Rites de Mai a été restauré en 4K (sous la supervision de son auteur) et est disponible sous forme de galettes sous la bannière de Carlotta Films.

 

3,5/6

 

 

Under the Blossoming Cherry Trees – Cerise tranchée - Japon – 1975 – Masahiro Shinoda

Rétrospective Masahiro Shinoda

 

Pitch : Un bandit montagnard massacre les nobles pour les piller. La femme qu’il épargne et kidnappe pour en faire sa compagne se révèle pire que lui. Elle le soumet à ses caprices meurtriers, le force à tuer des hommes et à lui ramener leurs têtes…

 

Avec ce conte macabre et sensuel, Masahiro Shinoda (L’Etang du Démon) développe une histoire onirique entre lutte des classes et perversité sexuelle. Une fusion des genres indéfinissable dans un Japon lointain où les samouraïs faisaient encore la loi. Sauf qu’ici le brigand bourru, libidineux et pas très finaud (Tomisaburô Wakayama, héros de la série des Baby Cart) est mené par le bout du nez par une des femmes (Shima Iwashita) qu’il vient de kidnapper pour la violer avant d’en faire sa femme.

Si cet homme rustre ne s’embarrasse pas trop des convenances, il a face à lui une femme peut-être encore plus immorale que lui, l’obligeant d’entrée à assassiner 6 de ses 7 femmes (il en faut bien une pour s’occuper de cette noble de la ville). Plus tard, cette dernière le contraindra à décapiter des hommes et des femmes afin de lui ramener les têtes qu’elle empile dans la maison comme de poupées ou pour les utiliser comme objet sexuel. Le décor est donc planté au milieu de ces champs de cerisiers dont les fleurs volètent en permanence à l’écran apportant une atmosphère surnaturelle de conte de fées et des couleurs vivaces à l’écran. On n’est pas si éloigné d’une version trash d’un récit pour enfants, avec en plus une résonance politique et sociale.

Car l’autre facette du film repose sur les oppositions entre la ville et la campagne. Force est de constater que le montagnard a du mal à survivre en milieu urbain. Trop de monde, de bruit et finalement, il n’est plus le Roi de son espace d’avant. Il ne trône plus sur ses femmes et ne tue plus pour manger en bon chasseur. Il devient un anonyme parmi une société nipponne qui ne s’avère pas bien mieux que lui au final. Il semble même s’assagir tandis que sa femme accentue sa folie destructrice et l’oblige à lui ramener toujours plus de têtes en guise de trophées, avec comme récompense de pouvoir coucher avec elle. Elle le domine et inverse le rapport de force, même si avec le temps cette ritournelle funèbre ne le fait plus rire.

Porté par cette atmosphère à la fois fantasmagorique, horrifique et perverse, Under the Blossoming Cherry Trees alterne les séquences décalées suintant d’un humour noir, de pamphlet politique avec une réflexion sur la condition d’existence, des pauvres, des riches et même des non-urbains, le tout ceint dans un érotisme déviant (il faut voir l’héroïne jouer avec les têtes tranchées sur ses tétons). A l’écran, on passe de moments très théâtraux situés dans la maison à des rêveries bucoliques et quasi surnaturelles. Marcher parmi les cerisiers au printemps semble procurer des sensations particulières à l’ensemble des personnages, preuve qu’il ne faut pas traverser une forêt peut-être bien hantée.

 

4/6

 

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Commentaires: 2
  • #1

    Adrien (jeudi, 08 septembre 2022 17:02)

    Intéressant de voir que Itim semble pencher sa spiritualité du côté de la religion Chrétienne. Les Philippines ont leurs propres rites et folklores qui de notre point de vue font sans doute très païen, du coup l'atmosphère doit être effectivement assez unique, surtout associé au paysage. Par contre ça à l'air de tirer un peu trop du côté du film d'auteur cliché, c'est dommage. J'ai plus l'âge pour les trucs contemplatif qui trainent interminablement.

    Under the Blossoming Cherry Trees est totalement mon truc par contre, merci pour la découverte je vais le traquer de ce pas ! Et puis Tomisaburô Wakayama quoi.

  • #2

    Roggy (vendredi, 09 septembre 2022 07:52)

    Dans Itim, il y a une forme de syncrétisme avec le folklore local mais la religion chrétienne est y pratiquée de façon très démonstrative. Un peu comme on peut le voir dans certaines régions d'Espagne. Ce n'est sans doute pas un hasard. Quant au dernier film, je ne suis pas si surpris qu'il t'attire :)