HANNIBAL

Saison 1 : 13 épisodes

Durée : 42 min/épisode

Date de création : 2013

Créateur : Thomas Harris, Bryan Fuller

Note : 5 / 6

Pitch : L'agent spécial Will Graham est recruté par le FBI en la personne de Jack Crawford pour arrêter un tueur en série cannibale. Graham possède en effet une grande capacité d'empathie, ce qui lui permet de se mettre dans la peau des meurtriers et de comprendre leurs modes opératoires. Cependant ce don est très lourd à assumer psychologiquement, raison pour laquelle Crawford demande à ce que Graham soit suivi par un psychiatre, choisissant pour cela le Dr Hannibal Lecter... loin de se douter que ce fin gastronome aux manières impeccables est en fait le meurtrier le plus recherché de Baltimore.

Le silence des lambeaux

Chaque épisode commence un peu de la même manière avec la découverte par la police d’un ou plusieurs corps, sauvagement assassinés (démembrement, énucléation, empalement...). C’est à ce moment-là que Will Graham intervient. Grâce à ses pouvoirs, il peut reconstituer la scène de crimes et se projeter à la place du tueur par le biais d’une mise en scène en flash-back très réussie. A noter l’horreur des situations et les maquillages de toute beauté réalisés par les concepteurs des faux corps qui jonchent la série. Et on se dit, qu’ils ont dû user quelques litres de latex au vu de la multitude de cadavres à produire. C’est aussi une des forces de la série, aller au bout de ses idées, sans contraintes, et sans occulter les atrocités commises. Même si la série est très sanglante, tout n’est pas montré et on devine hors champs ce qui est en train d’arriver.

Petit bémol néanmoins ; les situations peuvent sembler répétitives et on se dit que cette contrée est infestée de psychopathes au vu du nombre de victimes. Une exagération qui n’est pas réaliste mais nécessaire à l’évolution de la série.

Hannibal et Willy

Ce qui frappe dans cette série, qui pourtant est titrée Hannibal, est que justement ce dernier n’est pas le héros principal. Progressivement, au fil des épisodes, les scénaristes donnent de l’importance au personnage de Will Graham en suivant l’amplification de ses troubles mentaux. Hugh Dancy est habité par son personnage et compose une partition parfaite en homme qui perd pied au milieu de ses hallucinations.

Will est aussi perturbé par les scènes de crimes qu'il examine où il se met à la place du tueur, à tel point où on se demande si ce n'est pas la réalité. Et il faut bien dire que les situations sont sordides et inimaginables dans l'ingénuoisité comme dans la cabane avec les bois de cerfs ou la scène avec les corps alignés dans la forêt qui deviennent une champignonière !

On peut dire que très rapidement, il devient le personnage principal, ravagé par la folie et de plus en plus en dehors de la réalité. La deuxième partie de la série lui est presque consacrée alors qu’il est en train de découvrir la vérité sur Hannibal.

La fin de la première saison bascule ainsi dans une forme de paranoïa schizophrénique qui envahit les protagonistes entre rêve et réalité.

Dr Lecter et Mister Hannibal

Le personnage d’Hannibal Lecter est néanmoins la pierre angulaire de l’histoire, puisqu’il reçoit tous les personnages en consultation. Ces moments de dialogue et d’échanges permettent d’étoffer les relations, notamment avec Will qui devient en quelque sorte son ami. On peut même penser qu’il le protège volontairement alors que le jeune agent spécial le recherche sans le savoir.

De par sa grande intelligence, il manipule tout le monde et mène un double jeu. D’un côté, il continue ses exactions de serial-killer, et d’un autre il collabore avec la police à la recherche de tueurs qui relèvent souvent de ses propres méfaits. Hannibal est un vrai pervers, froid, calculateur. A ce titre, Mads Mikkelsen est absolument parfait en docteur impavide, exploitant son côté scandinave naturel. Ce rôle lui va comme un gant et fait presque oublier les prestations d’Anthony Hopkins. Provoquant les événements, il tue volontairement en copiant un tueur célèbre de Baltimore pour aiguiller la police sur de fausses pistes.

Seconds couteaux

La richesse vient aussi de ses personnages secondaires qui alimentent l’intrigue et permettent des rebondissements relationnels. Il y a le chef de la police au charisme austère et dur en la personne de Laurence Fishburne (Matrix), sa collègue Alana Bloom, qui est ostensiblement attiré par Will alors qu’elle sait que son amour est impossible. Mais aussi, les trois médecins légistes qui analysent les corps et apportent une caution scientifique (ambiance Experts) mais aussi un côté humour noir décalé (à l’image des "Lone gunmen" dans X-Files), seuls moments moins graves dans cette ambiance très anxiogène. Sans oublier la journaliste qui cherche le sensationnel ou la jeune fille dont le père était un tueur et qui cache de lourds secrets. A noter aussi, la présence de la superbe mais ambivalente Gillian "Scully" Anderson en psychiatre du Dr Lecter.

Masterchef

Hannibal est un esthète en matière de cuisine, un grand chef qui a la particularité de réaliser de grands plats à partir de viande humaine... et pour faire partager ses menus raffinés, il organise souvent des dîners entre amis ou avec les collègues du FBI. Comble de la perversité pour un tueur en série qui doit jubiler à faire ingurgiter de la viande humaine sans que personne ne soit au courant.

Avant chaque repas, on assiste ainsi aux diverses préparations, au découpage des morceaux, comme les poumons ou le cœur. Comme un spécialiste culinaire, il réalise, avec amour, des recettes toujours accompagnées d’un vin choisi en fonction du plat. Un gourmet.

Tueur né

Tous ces personnages très bien caractérisés évoluent ainsi dans une série aux antipodes des productions actuelles, qui va très loin dans les images sanglantes voire gores par instant. Doté d’une réalisation méticuleuse et raffinée, Hannibal possède une très belle photographie, où chaque décor, très travaillé, impose son identité bien particulière qui pourrait renvoyer à des paysages des films des frères Cohen ou à des romans de Stephen King.