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TRUE DETECTIVE

 

Saison 1 : 8 épisodes

Durée : 1 heure par épisode

Date de création : 2014

Créateur et scénariste : Nick Pizzolatto

Réalisateur : Cary Joji Fukunaga

 

Pitch : En Louisiane, en 1995, deux inspecteurs Rust Cohle et Martin Hart, enquêtent sur le meurtre d'une jeune femme. Alors qu'ils ont quitté la police, ils sont contactés en 2012 par deux autres inspecteurs alors qu'un meurtre similaire a été commis.

 

Note : 5 / 6

 

True Detective a remporté tous les suffrages (critiques et du public) et à juste raison. Sur une durée courte (8 épisodes), le show de Nick Pizzolatto prend le spectateur aux tripes dès le départ et le tient en haleine jusqu’au bout.

 

Hannibal détective

True Detective commence comme une série policière classique avec la découverte du cadavre d’une jeune fille contre un arbre, qui a la particularité d’avoir la tête ceinte de bois de cerf. Un assassinat qui ressemble à l’œuvre d’un détraqué pratiquant des rituels dignes d’une ancienne religion oubliée. D’entrée, l’iconographie du corps retrouvé renvoie directement aux exactions du Docteur Hannibal Lecter, dont la série éponyme montrait déjà des corps (avec aussi l’utilisation de bois de cerfs) mise en scène dans des postures issues directement de pratiques religieuses. Les deux séries se rejoignent sur cette mythologie avec au centre les meurtres peu ragoûtants d’un serial-killer. Mais, comme nous le verrons plus tard, les points communs ne s’arrêtent pas là.

 

Dans la moiteur du sud

Le fait que la série soit tournée en Louisiane renforce encore plus ce sentiment de noirceur qui parcourt True Detective. Une ambiance latente qui suinte des personnages à l’instar des paysages de bayous et des maisons isolées, comme si chaque objet, chaque arbre, chaque personne avait un secret enfoui au plus profond de lui. La caméra lente de Cary Joji Fukunaga (Jane Eyre) crée une atmosphère de chape de plombe en filmant au plus près la Louisiane et distille son intrigue au compte-gouttes. L’histoire est ainsi divisé en deux périodes. On retrouve les deux détectives chargés de l’affaire dans un chassé-croisé temporel à la fois en 1995 et en 2012. Une configuration qui durera pendant les 5 premiers épisodes. Les 3 derniers se déroulant en 2012. Ce qui peut dérouter au départ, mais qui permet de comprendre progressivement les tenants et les aboutissements de l’intrigue. En effet, les disparitions et les meurtres semblent reprendre des années après.

 

Woody et les hobos

La pierre angulaire de la série repose sur deux acteurs d’exception. Woody Harrelson (Martin Hart) passe pour le flic intègre, ayant des principes moraux au travail et avec sa famille, alors qu’il noie ses états d’âme dans l’alcool, trompe sa femme à l’occasion et sombre dans la violence comme un être psychotique. Ravagé par son travail, il fait pâtir à sa famille, et en premier à sa femme (Michelle Monaghan), les horreurs qu’il côtoie tous les jours.

Car, c’est bien là la vraie intrigue de True Detective. L’enquête policière n’est au fond qu’un prétexte pour examiner et pénétrer l’âme des deux flics. Les vrais enjeux du show tournent de fait autour des liens qui les unissent tout au long de la saison. Un rapport complexe porté par deux comédiens extraordinaires, au diapason dans leur relation, à la fois fraternelle et conflictuelle. A ce petit jeu, Martin, rictus aux lèvres, ne peut que constater les agissements de son collègue. Woody Harrelson amène sa carrure et sa mâchoire préminente au personnage à la fois mi-ange, mi-démon, semblant faire office de régulateur mais étant incapable de se contrôler. Surtout, inconsciemment, il se retrouve sous l’influence de son coéquipier, fasciné par ce personnage ambigu et complexe. Entre haine et désir.

Saint Matthew

La série permet de mettre en évidence la performance de Matthew MacConaughey (Rust Cohle) en flic halluciné et presque devin en 1995 et le même personnage 17 ans plus tard, en tenancier de bar alcoolique aux cheveux longs et sales. L’acteur porte la série sur ses épaules et ses interventions sont autant charismatiques lorsqu’il expose ses théories sur l’identité du tueur que lorsqu’il déclame des pans de philosophie ou des monologues sur la société lors de l’interrogatoire de 2012, où son intelligence au-dessus de la moyenne fait tourner en bourriques les deux flics face à lui. MacConaughey crève l’écran (comme d’habitude) à tel point que son personnage peut être vu comme un messie, un prédicateur des temps modernes, cynique envers l’humanité et donneur de leçons horripilants. Grâce au comédien, on boit ses paroles.

Rust Cohle est tout aussi tordu que son coéquipier mais dans un autre registre. Il possède un visage émacié, des yeux exorbités et promène sa dégaine de flic halluciné qui n’a pas dormi depuis des semaines dans une Louisiane empreint de mystères. Ce personnage particulier nous rappelle fortement celui de Will (le profiler dans Hannibal). En effet, comme ce dernier, Rust ressent les choses différemment comme s’il était capable de voir les événements sur une scène de crime a posteriori. Une similitude dans l’écriture des personnages qui va jusqu’à leur octroyer des hallucinations confinant à la schizophrénie. Rust et Will sont des réceptacles scénaristiques pour faire avancer l’intrigue. Un scénario alambiqué notamment sur la traque du tueur.

 

Les enfants du marais

True Detective est à la base un polar noir qui tend vers les ambiances lourdes et sombres d’un James Ellroy. Une filiation qu’on retrouve dans les meurtres rituels au milieu de cette Louisiane où le temps semble arrêté, et où ses habitants ne sont que des ombres inaccessibles. Rust et Martin rencontrent aussi bien des redneck que des politiciens corrompus (pléonasme ?) ou des adeptes d’un culte païen d’un autre âge. Une communauté régionale qui, à chaque interrogatoire, révèle une face cachée et ensevelie sous des tonnes d’horreurs familiales.

Ce qui amène la série aux lisières du fantastique quand la réalité s’immisce dans la pratique d’un culte syncrétique sataniste mi-vaudou, mi-catholique. Alors que les deux flics pénètrent le cœur du bayou, ils s’enfoncent dans les tréfonds de leur âme, noire et sans retour. A l’image des derniers épisodes qui les transportent vers un inextricable labyrinthe d’arbres et de végétation, antre du tueur où se trouve une église de fortune. Une quête de vérité qui s’apparente plus à une thérapie individuelle où chaque personnage cherche sa rédemption.

 

En résumé : True Detective est une série remarquable qui a cassé les code de la narration temporelle, en se concentrant sur la relation entre ses personnages et notamment sur ses deux héros en flics paumés et attachants, au détriment de son intrigue qui devient presque secondaire. La série mélange les genres avec bonheur entre polar glauque, disparitions étranges et relents de pédophilie dans un lieu où l’omerta règne en maître, et dans une consanguinité morale admise par tous.

 

A noter : La série se veut être une anthologie, ce qui signifie que chaque saison les personnages et le intrigues changent (comme dans American horror story). Dommage, car on aurait bien continué à errer sur les terres chaudes et humide du sud avec Rust et Martin comme guides.

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Commentaires: 14
  • #1

    Rigs Mordo (lundi, 13 octobre 2014 20:08)

    Que dire si ce n'est que tu nous balances là un dossier excellent, avec une plume fantastique et que tu parles plus que bien de ce que je considère comme la meilleure série de tous les temps (j'avoue cependant que j'en vois pas beaucoup). Ton texte est si génial que tu me replonges dedans et me donnes envie de me remettre les DVD, ce que je risque bien de faire prochainement tiens! Un chef d'oeuvre auquel tu rends honneur!

  • #2

    laseancearoggy (lundi, 13 octobre 2014 20:19)

    Merci beaucoup Rigs pour ton commentaire élogieux :) J'ai aussi beaucoup aimé cette série surprenante sur la forme et le fond. L'avantage de "True Detective" est qu'elle comporte uniquement 8 épisodes. Ce qui est suffisant pour développer une mythologie. Il va être difficile de faire aussi bien voire mieux dans la saison 2. Surtout avec d'autres personnages... Mais, pourquoi pas, restons optimistes !

  • #3

    Rigs Mordo (lundi, 13 octobre 2014 20:36)

    C'est surtout les nouveaux interprètes qui m'inquiètent... Je les trouve trop "beaux gosses", trop lisses, c'est dommage car Harrelson et McConaughey ont des physiques "normaux" qui rendaient le tout crédible. Mais ouais, dur de passer après la saison 1, clairement, voire impossible même!

  • #4

    laseancearoggy (lundi, 13 octobre 2014 20:43)

    Je viens de regarder le nom des prochains acteurs et, comme toi, ça m'inquiète aussi. Pour moi, Farrel et Vaughn ne leur arrivent pas à la cheville...

  • #5

    Princécranoir (lundi, 13 octobre 2014 22:00)

    Ah ben voilà ! Encore une chronique que je ne peux pas lire car elle me fait culpabiliser de n'avoir pas encore attaqué ces épisodes qui me font de l'œil depuis des semaines près du canapé ! z'êtes fier de vous m'sieur Roggy ?

  • #6

    laseancearoggy (lundi, 13 octobre 2014 22:09)

    Ben oui Monsieur Le Prince :) En même temps, je pense que tu peux la lire, car je spoile rien pour une fois. Je ne rentre pas dans les détails de l'histoire. Autre possibilité, tu vois la série et tu reviens :)

  • #7

    2flicsamiami (mercredi, 15 octobre 2014 09:19)

    Tout comme Princécranoir, sauf que je n'ai pas encore les dvd près de mon canapé ;)

  • #8

    Princécranoir (mercredi, 15 octobre 2014 17:26)

    I'll be back ;)

  • #9

    laseancearoggy (mercredi, 15 octobre 2014 19:13)

    A 2flicsamiami,
    Princécranoir, quand tu auras vu la série, tu l'as prête à 2flicsamiami, sinon personne ne lira mes avis :)

  • #10

    laseancearoggy (mercredi, 15 octobre 2014 19:15)

    A Princécranoir,
    J'espère bien que tu reviendras Arnold :)

  • #11

    Mr Vladdy (jeudi, 16 octobre 2014 17:40)

    Une série très intéressante que j'ai bien aimé. Je suis curieux de voir le virage qui sera pris dans la saison 2 avec le changement d'intrigue et de casting ;-)

  • #12

    laseancearoggy (jeudi, 16 octobre 2014 18:51)

    Je ne suis certain d'être impatient de voir la suite, sachant que le casting initial ne sera pas au rendez-vous. Après, il faut laisser la chance à la saison 2. Pourquoi pas, mais je ne suis pas fan de Farrel et Vaughn...

  • #13

    princécranoir (mardi, 25 août 2015 23:00)

    En effet, la plongée dans les eaux saumâtre du bayou américain ne laissent pas indifférent du tout. Les références évoquées sont en effet excellemment bien négociées par le scénario (Tobe Hooper traîne aussi dans les parages, c'est sûr) par une direction d'acteur remarquable, une réalisation impressionnante pour une production de cette envergure (le plan-séquence hallucinant de la fusillade dans la cité), le décor final juste saisissant ! Remarquable en tous points.

  • #14

    Roggy (mercredi, 26 août 2015 20:25)

    Je crois que tu as tout dit pour cette série fantastique à plus d'un point. Pas encore vu la deuxième saison et ses nouveaux héros, mais il va s'en dire que faire mieux sera forcément difficile.